Les récentes rumeurs sur l'achat éventuel du Groenland par les États-Unis ne pouvaient que rappeler à la mémoire des lecteurs et admirateurs de Jules Verne un de ses plus comiques romans, et pourtant peu connu : Sans dessus dessous. Le voici donc réédité pour la première fois avec ses illustrations originales de George Roux, et son chapitre supplémentaire, rédigé par le mathématicien Albert Badoureau. Verne l'avait en effet engagé pour qu'il lui fasse les calculs d'un gigantesque canon dont le recul redresserait l'axe de la Terre, de façon à amorcer un changement climatique, la fonte des glaces, et l'exploitation des ressources minières du Pôle nord. Roman vernien peut-être en partie prophétique, dans lequel se lit une remarque d'un des personnages, le Major Donellan : « Les terres arctiques paraissent être une annexe de ce continent américain. Identité de formation et d'aspect. Plus particulièrement, le Groenland est un prolongement du Nouveau-Monde, et il est certain que le Groenland tient à l'Amérique.... » Mais surtout roman où l'écrivain, masqué derrière les caricatures de ce théâtre vaudevillesque qu'il affectionnait particulièrement, exprime ses doutes et ses désillusions sur l'avenir d'un siècle scientiste sans conscience, qui ne semblait motivé que par l'accroissement du profit matériel. « Mais, des Esquimaux, des Tchouktchis, des Samoyèdes !... On ne les consulta même pas. Ainsi va le monde ! » Roman qui se termine toutefois sur une note religieuse, qui ne laissera pas de rassurer les esprits réfléchis, lorsque 150 ans plus tard les inquiétudes de notre humanité se sont singulièrement multipliées.